Avec la propagation inquiétante de la Klebsiella pneumoniae hypervirulente résistante aux carbapénèmes en Europe. L’European Centre for Disease Prevention and Control (ECDC) a récemment tiré la sonnette d’alarme quant à la dissémination rapide d’une souche de Klebsiella pneumoniae aux caractéristiques préoccupantes.
Cette bactérie, qualifiée d’hypervirulente et de résistante aux carbapénèmes qui sont des antibiotiques de dernier recours, est en effet en train de se propager à un rythme inquiétant à travers l’Europe. Selon l’ECDC, la Klebsiella pneumoniae hypervirulente résistante aux carbapénèmes (CR-HvKP) représente une menace particulièrement préoccupante.
Contrairement aux souches classiques de K. pneumoniae, bactérie opportuniste affectant généralement des patients fragiles, la version hypervirulente peut causer des infections sévères même chez des personnes jeunes et en bonne santé. Son spectre de maladie est également plus étendu, avec une présentation multifocale et une dissémination métastatique fréquentes. Des abcès hépatiques pyogènes, des méningites, des fasciites nécrosantes ou encore des endophtalmies font ainsi partie du tableau clinique. Entre 2021 et début 2024, le nombre de pays européens touchés est passé de 4 à 10 selon l’ECDC. La France, l’Italie, la Norvège ou encore les Pays-Bas font partie des nouveaux pays rapportant des cas d’infection à cette souche baptisée CR-HvKP.
En parallèle, le nombre de cas recensés est passé de seulement 12 à 143 en l’espace de 3 ans. Une augmentation vertigineuse qui ne serait que la face émergée de l’iceberg selon les experts, la capacité de détection faisant encore défaut dans beaucoup d’établissements hospitaliers européens. Autre élément aggravant, cette souche combine hypervirulence et résistance aux antibiotiques de dernier recours. Si les premiers cas de K. pneumoniae hypervirulente ont initialement été décrits en Asie dans les années 1980-1990, sans résistance associée, la situation a désormais radicalement changé.
L’acquisition récente de divers gènes de résistance aux carbapénèmes confère à la bactérie une multirésistance très inquiétante. La CR-HvKP est ainsi redoutable à double titre. D’une part, son caractère hypervirulent lui permet de causer des infections graves y compris chez des personnes auparavant en bonne santé. D’autre part, ses mécanismes de résistance aux carbapénèmes compromettent sérieusement la capacité à traiter ces infections. Or, les carbapénèmes sont considérés comme les derniers antibiotiques efficaces contre les bactéries multirésistantes. Face à la CR-HvKP, l’arsenal thérapeutique est donc extrêmement limité. Cette caractéristique est d’autant plus préoccupante que l’ECDC considère très probable que cette souche soit en train de devenir la cause dominante d’infections nosocomiales en Europe.
Autrement dit, la CR-HvKP se propagerait de manière foudroyante au sein même des hôpitaux et cliniques du continent. Sa dissémination silencieuse chez des patients fragiles risque donc de mener à une augmentation sensible de la morbidité et de la mortalité dans un futur proche, craint l’agence européenne. Face à ce constat alarmant, l’ECDC presse les États membres à réagir rapidement. Elle insiste notamment sur le besoin crucial d’augmenter les capacités de dépistage par des tests moléculaires rapides. Seule une identification précoce des porteurs, qu’ils soient symptomatiques ou non, permettra de déceler les chaînes de transmission nosocomiales et de les interrompre. L’agence appelle également à un renforcement des mesures d’hygiène et de confinement dans les établissements de santé.
À défaut d’une mobilisation d’envergure de l’ensemble des maillons de la chaîne de soins, l’Europe court un risque sanitaire majeur. L’épidémie rampante de CR-HvKP pourrait rapidement échapper à tout contrôle et provoquer une crise aussi grave que mal anticipée. La flambée de cas survenue en quelques années doit servir de signal d’alarme avant qu’il ne soit trop tard, alerte l’ECDC.
Alors, voilà la nouvelle pandémie infernale ? Peut-être…