L’Europe Sacrifie Son Agriculture sur l’Autel de la Géopolitique

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Alors que la suspension des taxes douanières sur la volaille ukrainienne arrive à échéance, l’exécutif européen envisagerait de renouveler ce cadeau empoisonné fait à Kiev au détriment du monde agricole. En important à nouveau massivement cette viande à bas prix, l’UE réitère son mépris pour les paysans européens, dont elle programme la disparition au nom de sa realpolitik.

On frise en effet le cynisme à l’heure où les éleveurs du Vieux Continent, exsangues après des mois de concurrence déloyale, espéraient un répit. Avant même que leurs plaies ne soient pansées, voilà que pointe à l’horizon la menace d’un nouvel assaut ukrainien contre lequel ils sont sommés, héroïques, de résister en silence. Les beaux discours sur le « Made in UE » n’auront décidément été que vains mots face aux impératifs géopolitiques.

Car derrière la noble cause ukrainienne, il y a ce marché obscur où l’on demande aux nôtres de lutter à armes inégales. Comment rivaliser quand les règles environnementales, sanitaires et sociales vous brident face à un adversaire dopé par le soutien inconditionnel de Bruxelles ? C’est un combat perdu d’avance auquel on convie nos agriculteurs, afin que d’autres mènent leur croisade diplomatique vers l’Est sans entraves.

On aurait pu espérer des leçons tirées après des mois de distorsions intenables pour nos éleveurs, déjà étranglés par tant de maux. Mais il n’en est rien : l’agneau sacrificiel paysan est de nouveau prié de s’allonger sur l’autel de la realpolitik européenne, pendant que nos élites proclament à l’envi leur attachement au sort des campagnes.

Alors, de grâce, cessons les faux-semblants ! Assumons clairement le fait que, derrière le poulet ukrainien, c’est toute notre conception de l’agriculture durable qui est jetée aux orties des enjeux du moment. Reconnaissons que les beaux projets d’autonomie alimentaire ou de relocalisation n’étaient que vœux pieux balayés par les vents mauvais de la mondialisation subie. Et cessons de feindre la surprise lorsque nos campagnes auront rendu l’âme, étouffées par le mépris technocratique.

Il est plus que temps de rebâtir une véritable souveraineté agricole en Europe. Mais celle-ci ne saurait exister aussi longtemps que la politique étrangère dictera sa loi aux paysans du Vieux Continent, sommés d’assumer toujours plus le poids des ambitions globales européennes. Tant que leur sort restera une variable d’ajustement, ceux qui nous nourrissent n’auront d’autre perspective que de disparaître.

https://www.ouest-france.fr/economie/agriculture/le-roi-du-poulet-ukrainien-fait-trembler-le-coq-gaulois-74379878-2155-11ee-83e6-ea6b7a82d0d2

https://www.europarl.europa.eu/news/fr/press-room/20230424IPR82043/suspension-des-droits-de-douane-sur-les-exportations-ukrainiennes-renouvelee

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