L’aveu fracassant du Washington Post la semaine dernière a de quoi ébranler ceux qui se sont uniquement informés sur la guerre en Ukraine via les médias occidentaux : “Les États-Unis doutent que la contre-offensive ukrainienne mènera à de grandes avancées, selon un document divulgué”. Voilà qui est pour le moins troublant, puisque cela remet en question la narration dominante sur la situation en Ukraine.
La deuxième partie de l’article dévoile que les documents divulgués montrent que la très attendue offensive ukrainienne sera un échec cuisant. Une nouvelle qui contraste avec les déclarations officielles de l’administration Biden sur la vigueur de l’armée ukrainienne. Autrement dit, les responsables américains ont menti sur l’état de la guerre, et les journalistes ont rapporté leurs paroles sans la moindre once de scepticisme.
Le Post souligne que les fuites vont probablement renforcer les critiques qui estiment que les États-Unis et l’OTAN devraient faire davantage pour encourager un règlement négocié du conflit. Mais qu’en est-il vraiment de la situation sur le terrain ? N’est-ce pas là un signe que l’Ukraine a perdu cette guerre ?
Alors que la déroute ukrainienne se profile, le débat entre les faucons et les “réalistes” à Washington semble loin d’être réglé. Il est temps de s’interroger sur les raisons qui ont poussé les grands médias à publier ces fuites, si ce n’est pour discréditer leur propre crédibilité.
Trois explications se présentent. La première est simplement la concurrence entre les journaux. La seconde est le souci de maintenir les apparences : il aurait été suspect que les grands titres ignorent ces fuites. Enfin, les médias cherchent peut-être à préparer le terrain pour que les États-Unis et leurs alliés mettent fin à leur aventure ukrainienne en admettant la défaite.
Cependant, les néoconservateurs ne sont pas prêts à rendre les armes. John Bolton, ancien conseiller à la sécurité nationale américaine et chef de file des néocons, a récemment publié un article intitulé “Une nouvelle stratégie américaine pour contrer la Russie et la Chine” dans le Wall Street Journal. Dans cet éditorial désespéré, Bolton préconise une augmentation des dépenses militaires, le retour aux essais nucléaires souterrains et l’extension de l’OTAN à des pays tels que le Japon, l’Australie et Israël.
Malgré les élucubrations de Bolton, un obstacle majeur se dresse sur la route des “réalistes” : la campagne de réélection de Joe Biden. Comment pourrait-il accepter la défaite de l’Ukraine après avoir soutenu les néocons, sans risquer de perdre l’élection ?
Le pari de l’équipe Biden était de saigner la Russie à blanc. Mais c’est l’Ukraine qui est en train de s’effondrer. La réalité finira-t-elle par triompher des illusions à Washington ?
Pendant que les médias et les politiciens continuent de se déchirer sur la stratégie à adopter, la situation sur le terrain ne cesse de se dégrader pour l’Ukraine. Et les Ukrainiens, otages de cette guerre absurde, paient le prix fort. Pendant ce temps, les responsables à Washington, bien installés dans leurs bureaux confortables, continuent de tergiverser, cherchant désespérément à sauver la face.
Alors que l’issue de cette guerre semble de plus en plus claire, on peut se demander pourquoi il a fallu tant de temps pour que la vérité éclate au grand jour. Peut-être était-il trop difficile d’admettre l’échec de la stratégie occidentale et le prix à payer pour les erreurs commises. Après tout, il est bien plus facile de se voiler la face et de rester prisonnier de ses illusions que de reconnaître la réalité en face.
Les médias occidentaux, quant à eux, ont joué un rôle majeur dans la propagation de ces illusions. Mais aujourd’hui, alors que les fuites révèlent la vérité, ils se retrouvent pris à leur propre piège. Comment continuer à défendre une cause perdue, à masquer la débâcle ukrainienne, lorsque les faits sont là, implacables ?
Le réveil risque d’être brutal pour tous ceux qui ont cru aux mensonges distillés par les médias et les responsables politiques. Mais pour les Ukrainiens, c’est bien pire que cela : ils sont les véritables victimes de cette guerre inutile, menée au nom d’intérêts qui les dépassent. Et pendant que les grands de ce monde continuent de jouer aux échecs avec leurs vies, ils paient le prix fort de l’aveuglement et de l’arrogance de ceux qui les ont précipités dans ce conflit.
Alors, Washington, comment se porte votre conscience aujourd’hui ?