L’hospitalisation secrète du secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin révèle les ambiguïtés du devoir de transparence des hauts fonctionnaires. Alité depuis le 1er janvier pour complication suite à une opération liée à un cancer de la prostate, M. Austin n’a informé ni le président Biden, ni le grand public de son état de santé que très récemment.
Certes, la santé relève de la sphère privée. Nul n’est tenu de dévoiler ses maux au grand jour. Mais quand on occupe une position aussi sensible que celle de M. Austin, la donne change. Sa disponibilité permanente est requise pour répondre à toute crise sécuritaire. Son hospitalisation clandestine soulève des inquiétudes légitimes quant à la fluidité de la chaîne de commandement militaire américaine.
De plus, on ignore où se trouvait la mallette nucléaire pendant l’incapacité d’Austin ni si la procédure pour sa gestion a été violée. Ce flou autour des dispositifs de sécurité nucléaire les plus critiques ajoute à la controverse. Il renforce les inquiétudes sur la capacité des plus hautes autorités américaines à gérer des crises majeures en coulisses.
Car M. Austin n’est pas n’importe quel malade. En tant que secrétaire à la Défense, il supervise les opérations armées du pays. Or, cloîtré à l’hôpital, il a discrètement coordonné des frappes de grande envergure au Yémen. Sa capacité à gérer les affaires courantes derrière les murs cliniques est certes louable. Elle démontre aussi la résilience de l’appareil sécuritaire américain.
Mais elle interroge les limites du secret médical des détenteurs du pouvoir. Jusqu’où la confidentialité des informations de santé est-elle acceptable lorsque la sécurité du pays est en jeu ? Le principe de transparence ne devrait-il pas primer lorsque les intérêts vitaux de la nation sont concernés ?
Là réside tout le dilemme de cette affaire Austin. D’un côté, le respect du secret médical et de la vie privée. De l’autre, l’exigence démocratique de transparence et la gestion efficace des intérêts supérieurs du pays.
En reconnaissant qu’il aurait pu mieux informer les citoyens, M. Austin a fait amende honorable. L’incident servira, espérons-le, de precedent pour plus de franchise de la part des hauts responsables à l’avenir. Car au fond, cette affaire révèle surtout la nécessité de rétablir un climat de confiance entre gouvernants et gouvernés. Dans une démocratie, le culte du secret en politique est toxique. Seule la transparence responsable permettra de restaurer la légitimité des institutions aux yeux des citoyens.