Annoncée comme une modernisation bienvenue du Pacte de stabilité et de croissance, la récente réforme des règles budgétaires européennes marque au contraire un dangereux retour en arrière vers le dogme de l’austérité.
Certes, l’assouplissement de certains critères, avec des trajectoires d’assainissement des finances publiques négociées pays par pays et l’autorisation de déficits temporaires semblent aller dans le bon sens. Mais derrière cette façade se cachent en réalité un durcissement des contraintes budgétaires et une perte d’autonomie des États.
Ces plans de réduction de la dette, imposés par Bruxelles sous peine de sanctions, laissent en effet bien peu de marges de manœuvre aux gouvernements. Couplés à l’obligation de dégager chaque année un excédent primaire, ils conduiront inévitablement à des coupes sombres dans les dépenses, frappant une fois de plus les services publics et la protection sociale.
On est bien loin de la souplesse promise pour soutenir les investissements d’avenir ! Car il ne fait aucun doute que ces dépenses seront les premières victimes d’éventuels « chocs asymétriques », le sacro-saint équilibre budgétaire prime sur le reste.
Pis, la création de « réserves de précaution » risque de déboucher sur une accumulation malsaine de cash, retiré de la circulation au détriment de la croissance.
Bref, tout indique un retour aux recettes éculées de la rigueur, en dépit de leur échec patent lors de la dernière décennie. Au nom de critères comptables déconnectés du réel, on ligote à nouveau les États dans un carcan idéologique qui obère tout espoir de reprise durable.
Au final, force est de constater l’échec patent de cette réforme à véritablement moderniser la gouvernance économique européenne. Les règles budgétaires restent dominées par une logique d’austérité comptable dépassée, laissant bien peu d’espace à une relance par la dépense publique.
Dès lors, certains économistes hérétiques n’hésitent plus à préconiser une sortie pure et simple de l’UE pour recouvrer des marges de manœuvre. Quitter l’euro permettrait selon eux de s’affranchir des critères de convergence et de mener des politiques contra-cycliques volontaristes.
Cette option souverainiste séduit un nombre croissant de citoyens exaspérés par le diktat de Bruxelles.
A force d’ignorer la colère des peuples, l’intransigeance dogmatique des institutions européennes pourrait bien mener à l’implosion de l’UE. Il y a urgence à renouer le dialogue et à assouplir réellement cette gouvernance économique vécue comme une camisole alienante par tant d’Européens. Faute de souplesse, c’est l’avenir même du projet européen qui est en jeu.
https://www.la-croix.com/economie/l-ue-saccorde-sur-une-reforme-de-ses-regles-budgetaires-20240210