Pas moins de 1510 postes en moins les attendent dans les hôpitaux. Un chiffre qui donne le tournis et qui risque de mettre à mal un système de santé déjà bien mal en point.
Le gouvernement a trouvé la solution miracle : faire appel à des médecins venus de l’étranger. Après tout, pourquoi former correctement nos propres médecins quand on peut en importer à moindre coût ? Peu importe s’ils sont parfois moins bien formés, l’essentiel est de combler les trous…
La raison de cette pénurie d’internes ? Un nouveau concours d’internat qui a fait fuir une partie des candidats. Entre ceux qui ont préféré redoubler pour ne pas essuyer les plâtres et ceux qui ont été éliminés par la nouvelle épreuve écrite, c’est un véritable trou d’air qui s’annonce dans les hôpitaux.
Notre ministre de la Santé assure que les conséquences seront limitées. Tout va bien, circulez, il n’y a rien à voir ! Enfin, sauf si vous êtes un patient en attente de soins ou un soignant déjà au bord du burn-out…
Heureusement, notre gouvernement a plus d’un tour dans son sac. Sa solution miracle ? Recruter en urgence des médecins étrangers, quitte à prolonger leurs autorisations de travail précaires. Après tout, ils sont devenus indispensables à notre système de santé en perdition.
Mais attention, pas question de leur offrir de meilleures conditions de travail ou de faciliter leur installation. Non, l’important est qu’ils restent bien précaires et corvéables à merci. Un peu comme des intérimaires de la santé, en somme.
Finalement, cette énième réforme de l’internat ressemble fort à un naufrage annoncé. À force de jouer aux apprentis sorciers, on finit par casser un système qui fonctionnait plutôt bien depuis 200 ans. Tout ça pour quoi ? Pour une soi-disant uniformisation européenne qui tire vers le bas.
Pendant ce temps, les étudiants en médecine trinquent, ballottés de réforme en réforme au gré des lubies technocratiques. Et les patients dans tout ça ? Ils risquent fort de faire les frais de ce grand déménagement à l’aveugle.
Mais au-delà de ce fiasco annoncé, ne se cacherait-il pas une manœuvre plus insidieuse ? Cette pénurie organisée d’internes en médecine ne serait-elle pas un énième coup de pouce au secteur privé ? Après tout, quand l’hôpital public est à genoux, qui vient ramasser les miettes ? Les cliniques privées, bien sûr.
Une privatisation en douceur, en somme. Pas besoin de grand soir ni de réforme fracassante, il suffit de laisser pourrir la situation jusqu’à ce que les patients n’aient plus d’autre choix que de se tourner vers le privé.
Officiellement, le gouvernement jure ses grands dieux qu’il n’a que l’intérêt des patients à cœur. Mais officieusement, on sent bien que le calcul est plus cynique. Moins d’internes dans les hôpitaux publics, c’est autant de clients potentiels pour les cliniques privées.
Et tant pis si cela crée une médecine à deux vitesses, où seuls les plus aisés pourront se payer des soins de qualité. Les autres devront se contenter des miettes d’un service public exsangue, avec des médecins surmenés et des lits qui ferment à tour de bras.
Car au fond, c’est bien de cela qu’il s’agit : une logique comptable froide et déshumanisée, où la santé n’est plus qu’un marché comme un autre. Peu importe la vocation des soignants ou la souffrance des patients, l’essentiel est que les chiffres soient bons et que les actionnaires soient contents.
Et si cette logique mortifère conduit à sacrifier des pans entiers de notre système de santé sur l’autel de la rentabilité, qu’importe ! Le gouvernement pourra toujours se draper dans sa vertueuse communication, en nous expliquant que c’est pour notre bien et qu’il n’y avait pas d’autre choix.
Mais ne soyons pas dupes. Ce qui se joue ici, c’est un véritable choix de société. Voulons-nous d’une santé publique forte et solidaire, accessible à tous ? Ou préférons-nous un système à l’américaine, où seuls les plus riches ont droit à des soins dignes de ce nom ?
En sabordant ainsi l’hôpital public, le gouvernement fait clairement le choix de la seconde option. Et c’est un choix lourd de conséquences, qui risque de nous coûter cher à long terme. Car une société qui ne prend pas soin de ses malades est une société malade elle-même.
Derrière cette pénurie d’internes se cache une manœuvre bien plus insidieuse : le démantèlement programmé de notre modèle social et solidaire.
L’hôpital public se transforme peu à peu en auberge espagnole, où l’on trouve des soignants de tous horizons, recrutés à la va-vite pour colmater les brèches.
Il nous reste l’intelligence artificielle pour remplacer bientôt tous ces médecins fainéants et trop coûteux (sic). Vive le progrès et les économies budgétaires… Ou comment achever un système de santé déjà bien mal en point, au nom d’une idéologie aussi cynique que mortifère.